L'avis de l'ANSES sur l'utilisation de micro capteurs pour le suivi de la qualité de l'air

29.11.22

Le 25 novembre 2022, au siège de l’ANSES à Paris, a eu lieu la journée de restitution et d’échanges concernant l’avis relatif à l’utilisation de micro-capteurs pour suivre la qualité de l’air. La solution Cozy Air fait partie des solutions auditées dans le cadre de cet avis et les équipes de Cozy Air ont été interrogés afin d’apporter leur point de vue sur l’usage des capteurs d’air.

L’émergence des micro-capteurs pour mesurer la qualité de l’air

Depuis plusieurs années, l’usage de micro-capteurs s’est démocratisé grâce à un coût d’achat plus faible, une facilité d’usage et une sensibilité croissante de la population. Les champs d’application sont variés : exposition personnelle, recherches, sensibilisation… Le public utilisant ces technologies est varié, du citoyen curieux aux chercheurs expérimentés.

En 2018, la DGS, la DGEC et la DGPR ont saisi l’Anses pour apporter des réponses et dresser un état des lieux sur l’utilisation de micro-capteurs. Cela à travers l’étude des travaux de recherches, projets participatifs ou études privées. Avec un focus sur les avantages et les limites de ce type de technologies notamment en comparaison aux techniques de mesure classiques dites de références. Et enfin une attention particulière est apportée sur le statut juridique d’une donnée provenant de micro-capteurs.

L’ANSES s’est donc appuyé sur un groupe de travail afin de pouvoir évaluer et étudier l’impact de l’utilisation de ces capteurs auprès de la population. Ce groupe de travail a été présidé par Mme Nathalie REDON – Enseignante-Chercheuse, Institut Mines-Télécom (IMT) Nord Europe, Centre d’Enseignement, de Recherche et d’Innovation (CERI) Energie Environnement - Spécialités : électronique, instrumentation, capteurs, qualité de l’air. A ses côtés : 8 membres experts en qualité de l’air, métrologie, science participatives, sociologie des usages numériques, santé publique, épidémiologie ou encore en science des données.

Quelle est la différence entre un capteur et un micro-capteur ?

La terminologie indiquée par le GT de l’ANSES se base sur les définitions proposées par l’Agence Française de Normalisation AFNOR dans la documentation relatif aux capteurs pour la qualité de l’air (FD X43-121, 2021).

Nous retrouvons donc 3 termes distincts :

- Elément sensible : « Dispositif transformant une grandeur physique observée en une grandeur utilisable de type signal électrique dont l’amplitude est relative notamment à la concentration d’un polluant recherché dans l’air » ;

- Capteur ou micro-capteur : « Dispositif équipé d’au moins un élément sensible servant à la prise d’informations relatives à la grandeur à mesurer ainsi que d’un système électronique pour l’acquisition et le traitement de données » ;

- Système capteur : « Matériel intégrant au moins un capteur ou un élément sensible et un logiciel pour détecter une quantité et/ou mesurer une concentration de composés (gaz, aérosol) sur un pas de temps prédéfini ».

Si vous souhaitez ramener cela à la solution Cozy Air, le système capteur est votre produit pyramide ou mural qui mesure en temps réel plusieurs paramètre et polluants. Les capteurs sont les composants électroniques à l’intérieur du produit pyramide ou mural. Et enfin les éléments sensibles sont les technologies semi conductrices, électrochimiques ou optiques présentes dans chaque capteur.

Quelles sont les principes de mesures disponibles pour les capteurs ?

Il existe 4 principes de mesures. Pour les gaz uniquement, nous retrouvons les semi-conducteurs et la photo ionisation. Et pour à la fois les gaz et les particules, ce sont les cellules électrochimiques et la détection optique.

Les capteurs à semi-conducteurs ou aussi appelés MOX peuvent détecter une grande variété de gaz. Ils sont d’un point vue tarifaire les plus accessibles et ont une sensibilité et une limite de détection adaptées aux concentrations pour la surveillance de l’air en intérieur ou en extérieur. Points faibles : consommation énergétique ne permettant pas d’utiliser de batterie et des interférences entre polluants si la donnée n’est fiabilisée après la mesure.

Les capteurs électrochimiques sont sélectionnés pour leur caractère sélectif. Plus coûteuse, cette solution présente deux inconvénients majeurs : une durée de vie limitée dans le temps et un temps de réponse long.

La technologie photo ionisation (PID) est recommandée comme indicateur des COV totaux. Toutefois son prix ne permet pas un usage à destination du grand public.

Enfin, pour le cas des particules, les technologies optiques se basent sur la diffraction infra-rouge. La concentration massique est déduite d’un comptage en nombre des particules indépendamment de leur nature. Le coût de l’élément sensible est faible. Cette technologie demande un traitement des données pour garantir un résultat fiable.

Votre capteur d’air connecté pyramide ou mural contient certaines de ces technologies, à savoir les semi-conducteurs pour les polluants gazeux, optique pour la mesure des particules et NDIR (infrarouge non dispersif) pour le CO2.

Comment sont utilisées les données provenant des micro-capteurs ?

Toute donnée mesurée par un capteur doit pouvoir amener à une interprétation et une utilisation des données. Cela est possible selon différentes manières, soit après un traitement et une expertise permettant de créer des indicateurs sur une interface visuelle ou directement sur le capteur avec un indicateur lumineux par exemple.

« Transformer un terrain sensible (peur de la donnée de qualité de l’air) en un terrain sensibilisé (comprendre et agir pour sa santé et celle des autres) »

De nombreux fabricants, dont nous faisons partie, ne se contentent pas de donner des concentrations de polluants en valeur chiffrée. En effet, avec une indication de 32µg/m3 de PM2.5 à un moment donné, ce n’est pas très utile si l’on n’est pas chimiste. L’avis de l’ANSES indique une grande disparité dans les propositions des fabricants et peu de documentations sur les modes de calculs des différents seuils ou colorisation proposée. En effet, l’application de seuil de pollution sur des données en temps réel est spécifique et l’utilisation de seuils règlementaires comme les VGAI Valeur Guide pour l’Air intérieur ne sont pas applicables.

« Les systèmes capteurs permettent d’acquérir des données en temps quasi-réel. Or les valeurs guides telles que celles de l’OMS sont en général associées à des durées d’exposition horaires voire journalières ou annuelles nettement supérieures au pas de temps de mesure des systèmes capteurs. De ce fait, ces valeurs guides ne sont pas utilisables pour interpréter des concentrations ponctuelles mesurées par les systèmes capteurs. De plus ces valeurs guides sont établies au niveau populationnel et ne peuvent pas être comparées à une donnée d’exposition individuelle. Il y a donc un décalage très net entre l’interprétation des données des systèmes capteurs et l’interprétation sanitaire à l’échelle individuelle qui peut en découler »

Une donnée qualité de l’air est-elle une donnée personnelle ?

Le nombre croissant de capteurs amène un grand nombre de données récoltées. La question de la protection des données personnelles doit donc se poser. L’avis de l’ANSES indique qu’une donnée de qualité de l’air peut être considérée comme personnelle uniquement si elle est associée à une donnée de géolocalisation permettant de remonter directement ou indirectement à l’identification d’une personne physique.

Chez Cozy Air, les données de qualité de l’air intérieur collectées par les capteurs ne sont pas associées à une personne physique, ni géolocalisée. Chaque donnée est associée à une pièce, à un étage, dans un bâtiment. La donnée qualité de l’air chez Cozy Air n’est pas personnelle. Toutefois, nous considérons cette donnée comme sensible et nous mettons tout en œuvre pour lui garantir une sécurité et une confidentialité accrue.

La complémentarité avec les techniques de mesures de références

L’utilisation de capteurs de qualité de l’air doit toujours être considérée comme complémentaire avec les instruments de référence métrologiques utilisés dans les études habituelles. Un système capteur n’a pas avec les technologies actuelles la vocation de remplacer ces instruments de référence. Il y aura toujours une incertitude logiquement plus importante sur les capteurs. En effet, les technologies de mesures sont différentes, tout comme leurs coûts ou leur facilité.

Cas concret :

Nous sommes intervenus dans une crèche pour une problématique d’odeur, de maux de tête et de nausées quelques jours seulement après l’ouverture de la structure. Le déploiement de systèmes capteurs dans les différentes espaces de la crèche pendant une période de quelques jours à permis de visualiser une émanation de COV dans l’air du au relargage des matériaux et produits de décoration récents. Avec le fonctionnement du système de ventilation, les niveaux restaient faibles. Toutefois le comparatif entre les différentes zones a permis de déterminer une zone en particulier qui présentait des niveaux plus élevés et une insuffisance du système de ventilation pour évacuer les polluants en présence.

L’usage du système capteur est ici très clair, à l’aide des récurrences, des variations en pollution et du comparatif en temps réel, il est possible de déduire une problématique spécifique.

Une fois cela fait, nous avons utilisé une technique de référence (Screening COV sur Radiello code 145) puis d’une analyse ATD/GC/MS selon la norme NF EN ISO 16017-2 dans la zone problématique. Les résultats ont démontré une concentration d’un composé chimique plus importante que les autres. En cause : la peinture d’une couleur différente sur l’un des murs de la pièce. Pour en finir avec ce cas concret, il s’est avéré que ce mur avait fait l’objet de plusieurs couches de peinture afin de cacher des défauts et potentiellement du non-respect du choix de la peinture utilisée dans le projet.

En conclusion, les 2 approches de mesures sont bien complémentaires : détection qualitative d’une situation VS analyse quantitative d’une situation.

La qualité de l’air, c’est n’est pas que le CO2

L’avis de l’ANSES alerte à plusieurs reprises sur ce sujet. Le sujet de la qualité de l’air est complexe et l’utilisation de systèmes capteurs nécessitent obligatoirement un accompagnement de l’utilisateur dans sa démarche de compréhension aussi bien des données, que des indicateurs visuels. Il est donné un exemple fréquemment rencontré pour des capteurs de CO2 indiquant mesurer « la qualité de l’air ». Alors que nous avons bien que le CO2 est un indicateur du confinement mais pas un indicateur de la qualité de l’air intérieur. Les usagers ne doivent pas se laisser tromper par des techniques marketing au détriment de la bonne compréhension de la donnée émises par le capteur au service de leur santé.

Les recommandations du GT et du CES sur l’utilisation de capteurs

- Pour les fabricants et distributeurs

Le GT demande aux fabricants et entreprises commercialisant les systèmes capteurs de poursuivre les efforts d’amélioration métrologique des capteurs. De documenter au maximum les conditions d’utilisation et d’informer les utilisateurs sur l’interprétation des données. De mener et soutenir les recherches sur les principes physiques de détection. Et enfin de promouvoir les systèmes capteurs mesurant les polluants les plus impactant pour la santé et aussi de développer des systèmes capteurs permettant de mesurer plusieurs polluant simultanément.

- Pour les utilisateurs à titre privé

Avec de nombreuses solutions sur le marché avec des performances très variables, le CES recommande aux personnes ou collectifs souhaitant s’équiper et mettre en œuvre un ou des systèmes capteurs : De prendre connaissance des éléments d’évaluations métrologiques pour choisir un système capteur adapté à l’usage envisagé ; De prendre connaissance de la documentation existante (notices d’utilisation fournies par les fabricants et distributeurs de systèmes capteurs, rapports, plateformes).

L’avis délivre également une série de recommandations pour les acteurs de la recherche que nous vous invitions à prendre connaissance si vous le désirez.